La Montagne

Dernières nouvelles du Soleil

Les taches solaires ne sont pas per­manentes, et leur évolution témoigne de l’activité du Soleil.

Elles persistent cependant plusieurs mois, et leur étude systématique, entre­prise par Galilée et son contemporain al­lemand le père Christoph Sheiner, a rapidement mis en évidence la rotation du Soleil sur lui-même ; on constate de plus que les régions équatoriales ef­fectuent une révolution en 25 jours, plus rapidement que les régions polaires (27,5 jours). Ceci implique que le Soleil n’est pas un globe rigide comme notre planète dont tous les points tournent autour de l’axe des pôles en 24 heures, mais qu’il est fluide, c’est-à-dire formé de particules mobiles les unes par rapport aux autres.

Si la nature de ce fluide était bien mystérieuse au XVII’ siècle (Descartes parle en 1644 d’une «matière fort liquide et dont les parties sont extrêmement agitées»), on sait aujourd’hui que le Soleil est une boule de gaz chauffé à près de 6.000 degrés pour la partie visible, ce qui lui donne une couleur jaune, alors que les taches n’apparaissent sombre que parce qu’elles sont plus froides d’environ 2.000 degrés.

Une fois admise la nature matérielle du Soleil, restaient à résoudre des ques­tions fondamentales à quelle distance de la Terre est-il ? Quelles sont sa taille et sa masse ? De quelle substance et comment s’est-il formé ? Ne risque-t-il pas de s’éteindre ? Si les premières esti­mations géométriques de la distance Terre-Soleil furent le fait de chercheurs grecs voici deux mille ans, il fallu attendre les années 1760 pour la déterminer précisément en observant des passages de Vénus devant le disque solaire : 150 mil­lions de kilomètres. Connaissant distance et diamètre apparent, on en déduit le diamètre de l’astre : 1.400.000 kilomètres, ce qui représente 109 fois le diamètre terrestre. Les lois de Newton (1687) nous donnent alors sa masse 2.1030 kilogrammes (2 suivi de trente zéros, ou 2 milliards de milliards de milliards de tonnes), soit plus de 300.000 fois la masse de la Terre.

Naissance et développement de l’astrophysique

L’observation des taches solaires marquait la naissance de l’astrophysique, qui est l’étude de la nature physique des astres, l’astronomie étant la description des mouvements célestes. Malheureusement, le manque de moyens d’observation limita pendant deux siècles l’acquisition de données nouvelles.

Par contre, le XIX’ siècle voit progres­ser spectaculairement la connaissance de la composition des couches externes du Soleil, grâce aux méthodes spectroscopiques d’étude de la lumière lorsque la lumière solaire dite « blanche » traverse des gouttes d’eau ou un prisme de verre, elle se décompose en de multiples couleurs, c’est ainsi qu’apparaissent les arcs-en-ciel ; si la décomposition est assez poussée par un instrument approprié, on obtient un spectre dans lequel des raies sombres ou brillantes sont caractéristiques des éléments chimiques qui ont absorbé ou émis de la lumière dans les couches externes du Soleil.

On compare ensuite ces raies à celles obtenues au laboratoire Fraunhofer, à Munich, reconnaît dès 1814 la signature du sodium, et dans les années qui suivent on établit ainsi l’identité des éléments solaires et terrestres les cieux ne sont donc pas formés d’une substance particulière.

Anecdote à relever, des raies non identifiées sont attribuées en 1868 à un élément inconnu sur Terre et que l’on baptise hélium (du grec hélios, soleil) ; ce n’est qu’en 1895 que ce gaz est identifié dans l’atmosphère terrestre ainsi que dans des minerais où il est libéré par la désintégration d’éléments radioactifs tel l’uranium.

D’autre part, le père Secchi, à Rome, étudie dans les années 1860 les spectres de quelque quatre cents étoiles et montre qu’elles se répartissent en quatre catégories dans lesquelles le Soleil trouve sa place c’est donc une étoile comme les autres, à ceci près que sa lumière ne met que quelques minutes pour nous parvenir en abondance, alors que celle des étoiles les plus proches met plusieurs années et que nous n’en recevons qu’une infime partie, bien insuffisante pour nous éclairer ou nous chauffer.

Au XX siècle, le développement de nouveaux détecteurs et la possibilité d’observer en dehors de l’atmosphère grâce aux avions, ballons, fusées et sur tout satellites (depuis 1962), ont permis d’élargir les observations à tout le domaine des ondes électromagnétiques rayons g et X, ultraviolet, visible, infrarouge, micro-ondes et ondes radio. Dans le même temps, les immenses avancées de la physique microscopique ont permis de comprendre les mécanismes mis en jeu.

Les recherches sont toujours nombreuses dans ce domaine, aussi bien avec la détection de particules dans des laboratoires souterrains qu’avec des instruments embarqués sur des satellites comme Ulysse, qui survolent actuellement pour la première fois les pôles du Soleil.

Une source d’énergie inépuisable?

Nous avons insisté plus haut sur les interrogations qui tourmentent l’humanité quant à la pérennité du rayonnement solaire. Il y a encore cent cinquante ans, l’exégèse biblique traditionnelle attribuait à notre monde un âge de quelques milliers d’années, ce qui autorisait à penser que l’énergie solaire résultait de réactions de combustion, comme si l’astre était un énorme bloc de charbon incandescent.

Mais les découvertes associées de la géologie et de la paléontologie au cours du XIXème siècle ont montré qu’il fallait compter en milliards d’années, et géologues et physiciens ont vécu quelques dizaines d’années difficiles, ne sachant où le Soleil pouvait bien trouver son énergie!

La solution vint avec la découverte des réactions nucléaires et l’élaboration de la physique quantique dans les premières décennies de notre siècle. Les scientifiques disposent aujourd’hui d’un modèle théorique du Soleil qui explique son fonctionnement actuel, mais aussi sa formation et son évolution ; nous le découvrirons dans un prochain article, à bientôt .

Article publié dans le journal « La Montagne » en octobre 1995

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